Jean-Yves Le Drian fait partie depuis le début des années 1980 avec ses amis F Hollande et JP Jouyet des trans-courants du Parti Socialiste, c'est à dire des centristes voulant retirer au PS tout lien avec l'histoire conflictuelle du monde ouvrier, toute trace d'idéologie marxiste ou de rapport avec la notion de politique située dans le champ de la lutte des classes. Dans le domaine diplomatique, leur bréviaire est l'atlantisme, à l'opposé des traditions d'indépendance et de non-alignement de la France.
Il fallait selon eux adapter le PS au monde moderne, à la mondialisation, c'est à dire l'acculturer, le convertir au marché, au capitalisme et au libéralisme.
Le rendre meilleur gestionnaire des intérêts du capitalisme que la droite, au nom d'une conception du progrès marquée par le postulat d'une communauté d'intérêt patronat-salariés, public-privé, entreprises-social.
Avec Valls, néo-libéral et néo-conservateur décomplexé, cette logique est poussée plus loin que jamais, à la hauteur de ce qu'à été cette nouvelle droite du New Labour en Grande-Bretagne du temps de Tony Blair ou du SPD en Allemagne du temps de Schröder, deux serviteurs zélés du grand capital, qui ont été bien recompensés par la suite par leurs employeurs, pouvant faire des piges de millionnaires pour des multinationales ou des conférences payées plusieurs centaines de milliers d'euros. Le Drian lui aussi n'hésite pas avec Laurent Fabius et Hollande à se faire le VRP des marchands de canon Dassault, Lagardère, DCN...
Aujourd'hui, la campagne régionale de Le Drian incarne l'aboutissement de se processus de désintégration du socialisme à l'intérieur du PS. On avait déjà plus le contenu du flacon, on n'a plus même aujourd'hui l'étiquette, alors pour chercher l'ivresse, il faut aller ailleurs...
Pas une référence au Parti Socialiste ou à un symbole socialiste sur les documents de campagne de Le Drian.
Juste sa gueule en tête de gondole, juste pour sa pomme, l'homme fort et providentiel qu'on doit suivre comme des moutons car les bretons c'est bien connu, formés aux vertus d'obéissance et du conformisme chez les curés, aiment le paternalisme et les hommes forts.
Le rouge et le rose, évacués, au profit du jaune des briseurs de grève, et du noir... on va dire que c'est la couleur de la Bretagne.
Un seul homme en scène, si peu présent en Bretagne, qui refuse tous les débats, qui ne fait pas campagne, qui a un bilan qui commence déjà un peu à remonter et un projet qui est "On continue. Avec nous, vous êtes entre de bonnes mains".
Le triomphe de la communication a-politique ou plutôt anti-politique, d'une politique strictement politicienne sans horizon de transformation ou d'éducation du citoyen conçue comme mise en avant publicitaire d'un produit (en Bretagne bien sûr), le degré zéro de la politique, l'irrespect de l'électeur à qui on prétend dissimuler la cohérence des orientations du candidat et de la liste, artisans de la politique du Gouvernement Hollande-Valls et du PS au niveau européen et national, une rupture complète avec les références de la gauche: on met en avant les symboles, les principes idéologiques, le collectif, le projet, et non l'homme fort et des couleurs qui font joli, rassurant, solide, mais qui n'ont aucun sens politique sinon le ni-gauche, ni-droite, de tous bords et du centre que prétend incarner le Drian réunissant des candidats de l'UDI, le président de la Chambre d'Agriculture des Côtes d'Armor et des régionalistes et communistes opportunistes (2) en rupture de ban.
Ismaël Dupont