La dernière occasion du quinquennat de modifier le cap suivi par le gouvernement est manquée. L’ultime véritable budget de la législature enfonce le clou des cadeaux sans contreparties aux entreprises et des « économies » budgétaires sur les services publics pour les financer.
François Hollande avait promis la redistribution, les Français auront droit en fait à la poursuite de l’austérité. Dernière occasion du quinquennat de modifier le cap suivi par le gouvernement marqué par la montée en charge du « pacte de responsabilité » et ses 41 milliards d’euros (à plein régime) d’allégements fiscaux et sociaux pour les entreprises sans contreparties exigées, le projet de loi de finances pour 2016, ultime véritable budget de la législature avant l’année électorale de 2017, enfonce le clou de la politique dite « de l’offre » au nom de la « compétitivité » des entreprises et des « économies » budgétaires pour la financer, dans le cadre contraint de la « maîtrise » de la dette et des déficits publics. En résumé, cela donne un budget marqué par quatre chiffres clés : 9 milliards d’euros supplémentaires d’« aides » aux entreprises viendront alourdir la facture à la charge de l’État ; 2 milliards d’euros seront consacrés à de nouvelles baisses d’impôt sur le revenu pour les particuliers ; tandis que les économies budgétaires pour financer ces mesures et la réduction du déficit public prévu (3,3 % du PIB en 2016 contre 3,8 % attendus officiellement cette année) atteindront 16 milliards d’euros au lieu des 14,5 milliards programmés, dont 3,5 milliards seront supportés par les seules collectivités locales, déjà financièrement asphyxiées.
Si le solde des emplois publics est positif de 8 300 postes pour la première fois depuis douze ans, cela est d’abord le fait de la révision à la hausse des personnels militaires dans le fil de la « guerre au terrorisme » engagée par le gouvernement tant à l’intérieur qu’à l’extérieur des frontières nationales. Hors personnels des armées, le solde est négatif de 1 400 postes. Si certains autres secteurs voient leurs effectifs augmenter comme l’éducation (+ 8 500 emplois) et la justice (+ 1 000), d’autres comptent les pertes, comme les agents des ministères de l’Économie et des Finances (- 2 500 postes).
Dans le détail, les employeurs sont les grands gagnants de ce projet de budget 2016, avec un total d’allégements au titre du crédit d’impôt compétitivité emploi (Cice) et des mesures comprises dans le « Pacte de responsabilité » s’élevant à 33 milliards d’euros. Un record à ce jour, excédant la totalité du produit de l’impôt sur les sociétés (IS) attendu pour 2016 (32,9 milliards), sans que l’on soit en mesure d’en mesurer un bénéfice quelconque en termes d’emplois. Cela représente aussi près de la moitié du déficit prévisionnel (72 milliards d’euros) et les deux tiers des intérêts annuels de la dette (44,5 milliards d’euros, pour une dette qui devrait culminer à 96,5 % du PIB en 2016). Dans le débat qui l’oppose, à l’intérieur même de sa majorité, aux « frondeurs », le gouvernement a donc tranché. Ces députés avaient en effet réussi à obtenir de la direction du PS une prise de position officielle en faveur d’une réorientation partielle de ces sommes vers le pouvoir d’achat des ménages. Le ministre des Finances, Michel Sapin, a clairement indiqué la nature du « débat » qu’il entendait tolérer dans la majorité : « Le parti propose et le gouvernement dispose, déclare-t-il au Monde. Chacun sait bien que changer de politique maintenant, ce serait la certitude de n’avoir ni les fruits de la politique précédente, ni les fruits de la nouvelle politique