L’HUMANITE DIMANCHE
Le Front de gauche tient, les 24 et 25 septembre, ses journées parlementaires. À cette occasion, André Chassaigne, président du groupe GDR à l'Assemblée, explique pourquoi il faut « désintoxiquer » le pays de la finance et travailler avec les députés de gauche critiques à l'égard du gouvernement.
HD. Quel est l'état d'esprit des députés du front de gauche en cette rentrée parlementaire ?
André CHASSAIGNE.
Nous n'avons aucune illusion sur un changement de cap de la politique menée par le gouvernement. Mais nous conservons notre détermination à combattre sa dérive libérale menée sans complexe. Et nous ne lâcherons pas dans notre volonté d'infléchir ses orientations, notamment pour le dissuader de servir une nouvelle fois la soupe à un MEDEF mis en appétit par le rapport Combrexelle. Tout est fait aujourd'hui pour transformer notre droit du travail en bouc émissaire des difficultés économiques. Nous aurons une parole forte pour expliquer que les difficultés viennent de l'absence d'une harmonisation sociale de haut niveau en Europe et du triomphe de la logique du marché qui n'a cure de l'économie réelle et de l'emploi. Expliquer aussi que la conférence de Paris sur le climat ne pourra aboutir si nous ne posons pas collectivement le constat de l'impasse sociale et écologique dans laquelle nous conduit le modèle économique actuel.
HD. Le débat budgétaire est le grand rendez-vous parlementaire de cet automne, comment allez-vous l'aborder ?
André CHASSAIGNE.
Le gouvernement vient d'annoncer qu'il abandonnait le projet d'une grande réforme fiscale, pourtant si nécessaire à notre pays. Dans le même temps, il confirme les orientations du funeste « pacte de responsabilité » qui permettra aux entreprises de bénéficier d'une baisse de leurs prélèvements de 41 milliards d'euros en 2017. C'est inacceptable ! Notre système fiscal est profondément injuste et inefficace. Une politique de gauche serait de le rendre plus progressif, plus transparent et de mettre à contribution ceux qui en ont les moyens, les grandes entreprises et les foyers les plus fortunés, pour permettre à l'État et aux collectivités de mener une politique ambitieuse. Nous continuerons aussi à porter avec force nos propositions pour « désintoxiquer » notre pays des marchés financiers, favoriser l'investissement utile et créateur d'emploi, lutter contre la fraude et l'optimisation fiscales. Nous agirons pour qu'elles puissent faire l'objet d'initiatives communes dans l'hémicycle. C'est une étape essentielle à la construction de l'alternative à la politique libérale du gouvernement.
HD. vous parlez d'initiatives communes avec d'autres députés : sous quelle forme ? Un nouveau groupe ?
André CHASSAIGNE.
Nous travaillons aujourd'hui au sein d'un groupe qui réunit deux composantes : les députés du Front de gauche et les députés ultramarins. Ce groupe de la Gauche démocrate et républicaine rassemble déjà des parlementaires de gauche libres dans leur expression. C'est sans doute ce qui fait sa force... et sa bonne santé ! Au-delà du groupe, sans se laisser impressionner par les déclarations du premier ministre proclamant qu'il n'y a pas d'alternative à gauche, les députés du Front de gauche multiplient les démarches pour faire émerger cette alternative constructive et force de propositions. Un exemple : lors du projet de loi Macron et du vote sur l'article 49-3, nous avons proposé à tous les « frondeurs » et aux « écolos » de porter une motion de censure de gauche. Nous avons, certes, échoué mais nous somme s convaincus que cette nécessité de construire des convergences finira par s'imposer tant elle est attendue par les citoyens. Aussi, en cette rentrée, nous avons décidé de concrétiser une collaboration avec d'autres députés de gauche en rupture avec la politique gouvernementale. Elle se traduira par des rencontres régulières pour un travail parlementaire commun. Quant à la construction d'un nouveau groupe, c'est un objectif que nous n'écartons pas. Mais pour que ce ne soit pas une simple alliance de circonstance, une telle démarche ne peut s'inscrire que dans un processus de travail collectif sur un projet commun. C'est ce que nous mettons en œuvre.