Procès : Zyed et Bouna, morts pour rien
18 mai 2015. Dix ans. C'est le temps qu'il aura fallu pour que la justice rende, enfin, un jugement dans le procès des deux policiers poursuivis pour la mort de Zyed Benna et Bouna Traoré, à Clichy-sous-Bois. Le tribunal correctionnel de Rennes a décidé ce lundi de suivre Parquet et de prononcer la relaxe.
"Morts pour rien". Car la justice avait l'occasion de reconnaître une situation qui ne peut plus durer dans notre pays. Combien de face à face réguliers, de bavures, de contrôles d’identités quotidiens, d’affrontements parfois violents, venant noircir les lignes d’une trop longue liste illustrant le malaise entre les jeunes de France et la police nationale ? Malaise, le mot est faible.
Cette illustration du deux poids deux mesures dans le traitement des affaires qui confrontent jeunes et policiers pose de nombreuses questions quant aux pratiques de la police. L’urgence est de comprendre les causes qui rendent trop souvent l’action des forces de police attentatoires aux droits fondamentaux et l’action de la justice en contradiction avec l’égalité des citoyens devant la loi. Et ces raisons sont éminemment politiques.
Des citoyens français peuvent être humiliés, frappés, détenus sans raison, voire mis en danger de mort car depuis près de 10 ans le monde politique a décidé ou a laissé prospérer l’entreprise de stigmatisation de la figure des « jeunes de banlieue ». A seul titre d’exemple, il faut se rappeler les mots des ministres de l’intérieur tels que « sauvageons » ou « racailles ». Et pour l’évidence, rappelons l’odieuse manipulation de Nicolas Sarkozy et Brice Hortefeux, qui ont fait manifester des policiers devant le tribunal de Bobigny au mépris du principe fondamental d’indépendance de la justice. Et ceux sont ces mêmes dirigeants qui ont passé les dix dernières années à démanteler méthodiquement le droit pénal des affaires. Voilà la réalité quotidienne des palais de Justice : des jeunes envoyés à l’abattoir et l’impunité pour les puissants.
Pour cette raison, le jugement rendu aujourd'hui est profondément choquant.
François Hollande, en 2012, s’était engagé à mettre fin aux contrôles au faciès mais ceux-ci persistent quotidiennement alors que la grande majorité des policiers aspire elle-même à des relations apaisée avec les citoyens.
Le PCF refuse d’attendre les bras croisés de nouvelles explosions de colères suite à des dénis de justice. Nous exigeons la mise en œuvre immédiate des engagements de campagne et l’ouverture d’un grand débat pour refonder les missions de la police et reconstruire une justice des mineurs digne de son ambition d’éducation et d’insertion sociale.
C’est une œuvre historique, une ambition de changement sur laquelle aucun nouveau renoncement ne pourra être accepté.
Fabien Guillaud-Bataille, responsable « Sécurité - Police » au PCF,
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