Marie-Christine Vergiat est euro-députée du Front de Gauche. Elle interviendra au Forum Européen Alternativa le samedi 30 mai, à Paris, sur le sujet "Un monde de mobilité".
L'Humanité: La proposition de la Commission Européenne d'instaurer des quotas pour répartir les migrants entre les pays est-elle une réponse au manque de solidarité entre Etats membres?
Marie-Christine Vergiat: Je suis généralement réticente aux quotas, mais, en l'occurence, il s'agit d'obliger les Etats membres à un minimum de solidarité. A cause du réglement Dublin II, ce sont les Etats par lesquels les migrants entrent en Europe qui reçoivent le maximum de demandeurs d'asile. On ne peut pas les gérer seuls. En outre, la clé de répartition des demandes proposée par la Commission tient compte de la taille de la population, du taux de chômage, du PIB, des efforts déjà réalisés... Cela paraît logique, sauf qu'on fait l'impasse sur les souhaits des demandeurs d'asile. Et c'est une réponse minimale avec 20 000 personnes concernées. C'est pour le moins insuffisant au regard des 500 millions d'habitants de l'Europe. Le gouvernement français doit arrêter de faire son cinéma. Notre pays est l'un des rares de l'UE dans lequel le nombre de demandeurs d'asile diminue.
L'Humanité: La possibilité pour les marines européennes d'intervenir dans les eaux libyennes, envisagée à Bruxelles, répond-elle aux défis posés par les migrations?
Marie-Christine Vergiat: Une opération militaire est très difficile à mettre en oeuvre sans risquer la vie des migrants. Elle serait, par ailleurs, inadmissible sans accord de l'ONU et des autorités libyennes officielles. Des moyens vont être déployés de la sorte pour des résultats dérisoires. C'est de la communication. La première mesure devrait être de répondre à l'obligation du droit international de sauvetage en mer. Le budget de l'opération "Triton" passe de 3 à 9 millions d'euros, mais le mandat de Frontex en matière de sauvetage en mer n'est pas modifié contrairement à celui sur les retours rapides.
L'Humanité: Quels seraient les axes d'une politique respectueuse des migrants?
Marie-Christine Vergiat: Il faut arrêter de manipuler les chiffres. La proportion de demandeurs d'asile en France par rapport à l'ensemble de la population est de 0,1%. La proportion de ceux dont les demandes sont acceptées, c'est 0,003%. On marche sur la tête avec des politiques inhumaines. Il faut, par exemple, cesser d'externaliser le contrôle des arrivées, et de plus en plus la gestion des demandes d'asile, vers les pays tiers où, dans certains cas, des dictatures sévissent. Et il est évidemment possible de proposer des politiques alternatives basées sur les règles de droit. Cela signifie avant tout une opération massive de sauvetage en mer avec des moyens adéquats. Mais aussi le non-refoulement des demandeurs d'asile, le respect de la Déclaration universelle des droits de l'homme à commencer par le droit au regroupement familial. La plupart des pays d'Europe ont d'ailleurs besoin de migrants pour des raisons démographiques et économiques. Il faut donc ouvrir des voies légales qui sont le meilleur moyen de lutter contre les trafics.
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